Aprotinine en chirurgie cardiaque – le retour ?
L’aprotinine est un inhibiteur de protéases à large spectre avec un effet antifibrinolytique efficace pour limiter le saignement et participer ainsi à la gestion personnalisée du capital sanguin en chirurgie cardiaque. Après une suspension pendant plusieurs années du marché européen, sa commercialisation a repris en 2016. Les dernières données scientifiques concernant les rapports coût-efficacité et bénéfices-risques semblent vouloir positionner principalement le médicament dans les chirurgies cardiaques à haut risque hémorragique, hors du champ de son autorisation de mise sur le marché (AMM) dans la chirurgie de pontages coronariens à risque hémorragique. En comparaison aux analogues synthétiques de la lysine qui représentent l’alternative à l’aprotinine, des signaux concernant sa sécurité d’utilisation refont surface et plusieurs questions demeurent actuellement sans réponse. Ainsi, la posologie adéquate d’utilisation n’est pas déterminée, et les chirurgies cibles les plus pertinentes au regard de la balance bénéfices-risques n’ont pas encore été définies. Par ailleurs, l’aprotinine perturbe la mesure de l’ACT, et la gestion de l’anticoagulation pendant la CEC demeure incertaine en présence d’aprotinine. Au regard de ces considérations, l’impact médico-économique de son utilisation reste à déterminer. L’essai randomisé contrôlé intégrant l’ensemble des bonnes pratiques peropératoires en matière de gestion personnalisée du capital sanguin, et comparant l’aprotinine dans ses deux régimes de dose à l’acide tranexamique à dose modérée apparaît une étape incontournable pour positionner de façon claire cet agent médicamenteux dans notre pharmacopée.