Note du Biologiste

Interférence des anticoagulants oraux anti-Xa lors de la surveillance des traitements par héparines non fractionnées : quelles conséquences ? Quelles solutions ?

Interference of oral anti-Xa anticoagulants during monitoring of unfractionated heparin treatments: what are the consequences? What are the solutions?

Sophie MELICINE, Laure MAUCORPS, Valérie ESCHWEGE, Julie CARRE, Dominique HELLEY, Isabelle GOUIN-THIBAULT, Nicolas GENDRON, Fabienne NEDELEC-GAC, Laetitia MAUGE

Volume 5 - Numéro 3 - Juillet-Septembre 2023

Rev Francoph Hémost Thromb 2023 ; 5 (3) : 134-40.

RÉSUMÉ

L’héparine non fractionnée (HNF) est un anticoagulant injectable d’action indirecte. Contrairement aux anticoagulants oraux directs (AOD), l’HNF nécessite une surveillance biologique quotidienne lorsqu’elle est administrée à dose curative afin de s’assurer de son efficacité anticoagulante et de limiter la survenue d’événements hémorragiques. Actuellement, la surveillance biologique de l’héparine est préférentiellement réalisée par la mesure de l’activité anti-Xa plasmatique, et de façon moindre avec le temps de céphaline avec activateur qui manque de spécificité. Toutefois, chez les patients initialement traités par un AOD anti-Xa bénéficiant d’un relais par HNF, il existe un risque important d’interférence de l’AOD avec la mesure de l’anti-Xa HNF. La présence d’AOD anti-Xa résiduel dans l’échantillon de façon concomitante à l’héparine peut conduire à une surestimation de l’activité anticoagulante propre de l’héparine et ainsi à des adaptations posologiques inadaptées. Ce risque d’interférence ne doit pas être négligé par les biologistes : l’interférence existe même lorsque la concentration d’AOD est inférieure au seuil de sécurité hémostatique (30 ng/mL) et peut durer plusieurs jours, exposant le patient à un défaut d’anticoagulation. Afin de contourner cette problématique, plusieurs alternatives existent et sont en cours d’évaluation. Cette note fait le point sur les interférences des AOD anti-Xa et les différentes alternatives utilisables en pratique courante, en exposant leurs avantages et inconvénients. Cette thématique souligne également l’importance de la communication entre le biologiste et le clinicien sur les traitements anticoagulants reçus par les patients, y compris ceux reçus dans les jours précédant le bilan biologique.

MOTS CLÉS

activité anti-Xa, AOD, héparine

ABSTRACT

Unfractionated heparin (UFH) is a parenteral indirect anticoagulant. Unlike direct oral anticoagulants (DOAC), UFH requires daily monitoring when administered in curative dose to ensure its antithrombotic efficacy and to prevent haemorrhagic complications. At present, UFH monitoring is preferably carried out by measuring plasma anti-Xa activity, and to a lesser extent by measuring activated partial thromboplastin time, which lacks specificity. However, in patients previously treated with an anti-Xa DOAC and switched to UFH, there is a high risk of the DOAC interfering with the measurement of UFH anti-Xa activity. Residual anti-Xa DOAC in the sample at the same time as heparin can lead to an overestimation of the anticoagulant activity attributed to heparin and thus to incorrect dosage adjustments. This risk of interference should not be overlooked by biologists: interference may occur even at concentration of DOAC below the haemostatic safety threshold (30 ng/mL) and can last several days, thereby exposing the patient to an anticoagulation failure. To overcome this problem, several alternatives are being studied. This note provides an update on anti-Xa DOAC interference and different alternatives available in current practice, outlining their advantages and drawbacks. It also underlines the importance of communication between biologists and clinicians on anticoagulant treatments received by patients, including those received in the days prior to sampling the biological tests.

KEYWORDS

anti-Xa activity, DOAC, heparin